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Ciné-Série : Le blog d'un passionné!
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22 février 2010

Critique : "Un Prophète" de Jacques Audiard

Grand Prix à Cannes, succès critique et public énorme, nommé pour 13 césars et à l'oscar du meilleur film étranger, autant dire qu'il y a consensus unanime autour du dernier film de Jacques Audiard. Un grand chef-d'œuvre Un Prophète? Oui, mille fois oui.

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UN PROPHETE de Jacques Audiard

Malik, 19 ans, rentre en centrale, la prison des grands, des durs. Il n'a pas de passé, une page vierge, et ne sait ni lire ni écrire. Il se retrouve enfermé pour avoir agressé un flic à l'arme blanche, même si cela nous semble flou et que l'on n'en saura pas plus. Il semble être SDF. Mais le voilà qu'aujourd'hui il doit s'installer dans cette mini-société qu'est la prison, et y trouver sa place...

Cette présentation du personnage, de faire de Malik un type totalement vierge, sans passé et qui va se construire devant nous, en 2h30 qui passe à toute vitesse, est la première grande idée de Jacques Audiard. Son film va nous permettre de suivre l'ascension d'un caïd, qui va en partant de rien réussir à s'imposer, à trouver sa place et à s'installer en haut sur l'échelle de la grande criminalité. Malik est donc un héros, que l'on peut voir à la fois comme positif et négatif. De la prison, Malik en retire des enseignements qui le mèneront vers la criminalité, mais de ces enseignements, Malik sort plus instruit, plus fort, plus construit, et a su se jouer de ceux qui voulaient se jouer de lui, et ainsi pu pouvoir traverser ces années de prison sans y laisser sa peau. Il y laissera peut-être sa morale...

Il est difficile d'analyser sur une simple critique tout ce que le film d'Audiard peut nous dire, car tel la marque des très grands films il nous en dit plus que ce qu'il nous montre.

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Pour reprendre les choses à leur début, Malik débarque en prison à seulement 19 ans, ne connaissant personne à l'intérieur ou à l'extérieur de la prison. Isolé, fragile, c'est une proie facile. Le clan corse de la prison, mené par César Luciani (Niels Arestrup, immense, comme l'acteur magistral qu'il est), va alors lui mettre la main dessus, et ne lui laisser aucunes options : tu tues un type, ou alors on te bute. Malik doute, est effrayé, ne peut imaginer tuer un mec...Mais il ne pourra y échapper, et exécutera le contrat. Une scène atroce à regarder, Audiard filmant la violence au plus près, sans fioritures aucunes. Brut. Brillant! Voilà le jeune Malik sous la coupe de César, protégé et intégré au groupe, même si son identité d'arabe le heurtera au profond racisme des membres du clan corse, ce qui les mènera peut-être à leur perte...

A partir de là, Malik s'installe dans la taule, exécute des tâches pour César, courbe l'échine, ferme sa gueule, mais observe. Apprend. Il va aux cours donnés dans la prison, et apprend à lire, à écrire, à compter, pour ainsi mieux réfléchir et mieux s'organiser. Il rencontre aussi d'autres types : Ryad, son ami, un vrai. Leur relation est d'ailleurs très belle, profonde (Adel Bencherif qui joue Ryad est tout à fait remarquable!). Et Jordi le gitan (Génial Reda Kateb, plus vrai que nature!) avec qui Malik va réussir à installer son commerce de shit, du gros, et notamment à l'extérieur, en banlieue, avec l'aide de Ryad une fois qu'il sera sorti de taule.

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Le film nous montre de façon tout bonnement immense comment peut se former un héros moderne (même s'il est négatif!), et arrive par là à imposer une nouvelle gueule au cinéma français! Des personnages de fictions, des héros de cinéma, qui se nomment Malik ou Ryad! Et tout en nous montrant l'ascension d'un petit gars sans rien qui se découvre être un puissant bonhomme, un caïd, il nous présente un acteur méconnu jusqu'ici, Tahar Rahim, qui devant nous se découvre être un grand acteur. Génie d'Audiard, encore une fois, d'avoir décider de prendre un acteur inconnu du grand public afin de lui faire parcourir un voyage du même acabit que son personnage, de nous présenter un gamin qui devient un homme, dur, mais de notre siècle, de notre pays la france.

Tout en se jouant d'une grand ironie, à l'image du titre du film, Audiard signe un film puissamment réaliste, faisant un constat accablant des prisons et de la criminalité française. Il arrive, derrière cette figure héroïque que peut-être Malik, a nous signifier comment l'échec social et économique d'un société peut amener à la délinquance, et celle-ci à la case prison, qui au lieu de réinsérer va être une école magnifique pour rentrer dans la grande criminalité. Mais sans jamais jouer la carte du film qui se veut documentaire et ultra-réaliste, en assumant la fiction, en la cherchant à tout pris, en faisant du cinéma quoi! Audiard parvient à toucher au plus juste, au plus vrai. Sa mise en scène à l'épaule est puissante, cadrant au plus près des corps, des chairs, le tout rythmé par la musique d'Alexandre Desplat (superbe composition) omniprésente sans jamais qu'on ne la remarque et qu'elle n'envahisse l'image.

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Après son immense De Battre Mon Coeur s'est Arrêté, Jacques Audiard signe un film d'anthologie, à marquer d'une pierre blanche dans ce début de siècle du cinéma français! Il offre un grand film de genre, un des plus grands même (c'est digne du Trou de Becker), et fait un film sur la france d'aujourd'hui en offrant une nouvelle gueule sublime au cinéma français : Tahar Rahim, Adel Bencherif, Reda Kateb, etc. Bref, on pourrait en dire tellement sur la grande claque que nous met là l'ami Audiard, mais courez plutôt voir ce chef-d'oeuvre, ou achetez-le en DVD, ça vient de sortir. MAGISTRAL. -ASH-

Film français (2h35). Scénario : Jacques Audiard & Thomas Bidegain d'après un scénario original d'Abdel Raouf Dafri & Nicolas Peufaillit. Réalisation : Jacques Audiard. Avec : Tahar Rahim, Niels Arestrup, Adel Bencherif, Reda Kateb, Hichem Yacoubi, Gilles Cohen & Leïla Bekhti.


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